Dernière née des médias mulhousiens, Radio Eponyme a opté pour Internet comme ultime medium de diffusion. Un choix stratégique qui n’est en rien étranger à l’évolution des comportements de consommation des médias ainsi qu’à la généralisation de l’accès haut débit.
Et de trois : depuis le 18 février dernier, le paysage des webradios mulhousiens a accueilli un nouvel acteur : Radio Eponyme. Emanation de l’association culturelle du même nom, cette structure à la tonalité électro-rock s’inscrit dans la configuration concurrentielle du Web où sévissent déjà radio MNE (Mulhouse Net Expérience) et Radio Campus Haute-Alsace. «Notre concept se positionne à contre-pieds de la philosophie de radio MNE dont l’équipe travaille principalement en ateliers populaires et privilégie le débat. Nous n’avons pas cette prétention là : nous sommes exclusivement des défricheurs de musique en lien avec la programmation du Noumatrouff», explique Jérémie Zindy, l’un des trois animateurs. A l’image de la majorité des radios françaises en ligne, cet organisme est financièrement et techniquement soutenu par une figure associative locale. «Cette salle de concert a toujours souhaité étoffer son site en y diffusant sa propre radio. Ce partenariat nous facilitera l’accès aux artistes qui s’y produisent et nous aidera à révéler les backstages des festivals. Pour le reste, nous sommes maître de notre ligne de conduite», assure ce chargé de communication.
Une «playlist» enrichie en permanence par des morceaux inédits
Le personnel de radio MNE, dont les ficelles sont tirées depuis mai 2010 par Old School, soutient les mêmes propos. «Les animateurs sont libres du contenu de leurs émissions tant que cela ne va pas à l’encontre de nos valeurs principales qui sont le respect, l’égalité et la lutte pour l’éducation populaire», soutient Marlène, une salariée de cette association. Outre ces éléments, l’indépendance de leur grille de programmation est garantie par l’absence de réclame. Ils sont donc exemptés de l’impératif cruel de l’audimat. «Les auditeurs détestent ces coupures publicitaires. Du coup, ils zappent. Nous misons sur l’originalité de notre playlist enrichie en permanence par des morceaux inédits pour les en dissuader », espère Jérémie Zindy. «Mais le réel atout de notre webradio est la liberté d’écoute des programmes. Une fois qu’une émission a été diffusée en direct, elle peut être immédiatement écoutée en podcast via les archives et ce 24h/24», s’enthousiasme- t-il. Ce concept séduit principalement les 15-25 ans car l’offre est parfaitement adaptée à leur comportement de consommation des médias. Selon une enquête de l’institut de sondage Ipsos, 43 % des internautes utilisent Internet pour écouter de la musique. Comme le résume Jérémie Zindy, «chacun y fait son marché en fonction de ses envies».
Une émission en direct de Tunisie
Les fréquences hertziennes de plus en plus rares, ces amateurs optent généralement pour Internet comme medium de communication pour échapper aux quotas imposés par le CSA (obligation, entre autres de diffuser 40% de chansons françaises dans la journée). Ils s’assurent aussi une diffusion internationale grâce à la généralisation de la connexion haut débit. «Le 7 mars dernier, nous avons réalisé une émission avec un intervenant tunisien qui, étant sur place, a évoqué la situation du pays depuis la révolution», raconte Marlène qui anime, un mardi sur deux, L’agenda bretzel, une émission répertoriant les sorties culturelles des alentours à ne pas manquer. L’équipe a utilisé un réseau social pour avoir le son et l’image car leur budget est restreint. Faute de recettes publicitaires, les coûts de fonctionnement et les investissements sont minorés par rapport aux radios «traditionnelles ». Les interventions sont principalement bénévoles. «Radio MNE compte une quarantaine d’animateurs. Côté technique, nous essayons de les former un maximum pour qu’ils soient autonomes. Nous n’avons pas encore de technicien présent en permanence pour tout chapeauter», déplore Marlène, cette Mulhousienne au look de pin-up. L’actuelle programmation tourne quelque peu en boucle, les volontaires peinant à dégager du temps libre pour enregistrer de nouvelles émissions. «Nous espérons devenir un média complémentaire à ce qui se fait déjà dans nos journaux locaux».
Créées fin des années 90 aux Etats-Unis, ces webradios associatives ne sont pas obsédées par l’audimat. Elles peuvent donc cibler un public précis quoique restreint, leur motivation étant surtout de partager leur passion. Contrairement à leurs «grandes soeurs» à tendance généraliste, elles ont une identité propre et bien tranchée. «Nous tenons à valoriser les artistes locaux et à privilégier les débats. Nous ne voulons pas être moralisateur mais juste amener une réflexion sur certains thèmes de l’actualité. Nous espérons devenir un média complémentaire à ce qui se fait déjà dans nos journaux locaux. Cet aspect est donc à creuser », affirme Marlène. Avec ou sans expérience, n’hésitez donc pas à franchir le pas de la porte de cette webradio participative où, comme le clament ses dirigeants, «n’importe qui peut faire n’importe quoi»… à condition d’avoir une idée de départ.
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